COMPTE RENDU D’UNE COMMISSURE DES MOTS DU 26 NOVEMBRE 2003, à propos d’un extrait du courrier de convocation du Medef aux partenaires sociaux pour la re-signature du protocole, le 13 novembre 2003.

Nous nous sommes réunis ce jour à 18h30. C’était chouette. Nous avons continué à deviser sur l’extrait de la convocation du Medef aux partenaires sociaux :

« , SUITE à une ERREUR SUSCEPTIBLE d’ENTACHER la RÉGULARITE de ces TEXTES, pour CLARIFICATION. »

Difficile de rendre compte de nos échanges. En gros, la constatation que cette phrase est fort inspirante. Par sa simplicité, probablement très choisie, et qui laisse entendre, qui implique beaucoup de choses passionnantes.

D’abord, que la régularité de ces textes est absolument incontestable ; elle est à la base même du message .
L’erreur pourrait, éventuellement, « entacher » cette régularité. Sans la transformer en irrégularité, jamais. Et cette erreur - et il n’y en a qu’« une », d’erreur - est « susceptible ». D’entacher. La susceptibilité de cette erreur est rigolote, elle implique un futur, et une fragilité aussi.

En tout cas, quand on est susceptible, c’est qu’on a un potentiel. En l’occurrence, un potentiel d’entachement. Elle a eu lieu certes, mais il n’est pas certain qu’elle entachera. Elle n’entache pas, elle PEUT entacher. La méchante. En fait, c’est comme si tout était à cause d’une erreur. Génial : « C’EST LA FAUTE à L’ERREUR !!! »

« Quant au futur impliqué par la « susceptibilité », il est redoublé par celui de « SUITE À ». Double futur, qui éloigne le tout. Il y a une erreur susceptible de, et on convoque pour étudier la suite de cette erreur. On est donc loin, très loin d’une correction, qui est, a priori, la « suite » logique d’une erreur.

Et de toute façon, on ne parle pas d’une correction (ça va pas, la tête ?), mais d’une clarification.

Il faut donc clarifier. À noter que clarifier signifie à l’origine GLORIFIER. Ça, ça a dû leur échapper, tout de même... Clarifier. (Ce que fait Ferry par exemple, qui, à force de clarifier, fait que personne ne banne rien. Il y a réforme, ou pas ?).
On clarifie. On rend plus clair ce qui est menacé de tache. On nettoie, un coup de gant de toilette. Léger. On détache. Comme une tache de café sur le jean. Un coup d’eau chaude, et il n’y paraît plus.
TEXTE vient du TISSU latin. Entacher un texte, assez cohérent.

UNE erreur, DES textes. C’est vraiment pas grand’chose. « Une seule erreur, dans Des textes ? » Vraiment, une goutte d’eau dans l’océan !!

Et puis une erreur n’est pas une faute. L’erreur, elle est d’inattention, non intentionnelle ; coquille ! Ah, s’il s’agissait d’une faute, il y aurait punition derrière. Là oui. Mais une erreur.
ERREUR vient du latin errare, aller ça et là. ERRARE HUMANUM EST .

Pas mal de couples là-dedans :
SUITE / SUSCEPTIBLE DE
SUITE / RÉGULARITE
ERREUR / ENTACHER
ERREUR / RÉGULARITE
ERREUR / TEXTE
ERREUR / CLARIFICATION
ENTACHER / TEXTE
ENTACHER / CLARIFICATION...

Joli coup, baron ! : suite à une erreur susceptible d’entacher la régularité de ces textes, pour clarification, réunissons ceux qui ont bien entendu le message. Il ne s’agit de rien. Un rien. La panique de cet été : un rien. Le faux : un rien. Le « tripatouillage » : un rien. L’antidatage : un rien. Le fonctionnement anti-démocratique de ces « négociations » : un rien.

La commission des mots s’est approprié un pan de mur du 2è étage de Charente, où nous (proto)collerons nos petites trouvailles.