Les intermittents et précaires appelaient à manifester ce matin [hier, vendredi 4 avril, ndr] devant le palais de Chaillot à Trocadéro où se tient toute la journée une conférence entre les différents ministres européens de la culture.
C’était l’occasion de montrer encore une fois leur opposition à la loi ratiboisant les conditions d’indemnisation chômage des intermittents du spectacle mais également des intérimaires, mais à peine rassemblés, ils se sont fait encercler à une centaine par de nombreux CRS, tandis que le rassemblement plus tranquille (CGT) était tenu à une distance très respectable derrière des barrières, à l’autre bout de la place du Trocadéro. L’encerclement continuait vers 14h00.
À noter que toutes les issues de la place du Trocadéro étaient sévèrement gardées par des tonnes de CRS.
Source paris-luttes.info, où vous trouverez également un reportage photo.`
Voici le tract du jour :
Pas de culture sans droits sociaux !
Les 4 et 5 avril les Ministres de la Culture de l’Europe sont réunis au Palais de Chaillot à l’invitation du gouvernement français.
Nous nous réjouissons qu’on s’intéresse à la culture, mais la culture, ce sont des gens qui créent, qui bricolent, qui vivent. Et comment pourraient-ils vivre s’ils n’ont plus rien pour payer leur loyer, comment pourraient-ils créer si on ne leur donne pas le temps nécessaire à la création ?
N’y a-t-il pas un immense mensonge à tenir de beaux discours sur la culture quand les droits sociaux sont détruits, peu à peu, partout, dans toute l’Europe ? Comment écrire quand on est obligé de cumuler deux ou trois petits boulots pour arriver à payer ses factures ? Comment peindre quand on travaille pour une plate-forme d’appel ? Comment composer quand on est stagiaire pas payé préposé à la photocopieuse ?
Vous croyez que Marcel Proust aurait écrit À la Recherche du Temps perdu s’il avait dû répondre à des convocations de Pôle Emploi ? S’il avait dû accepter n’importe quel boulot minable sous peine de sanctions ? S’il avait subi vos lois Hartz et votre RSA ?
Ministres de la Culture de l’Europe - si vous prétendez que la culture, l’art, la création sont compatibles avec le plein emploi précaire et sous-payé dont rêvent vos gouvernements, vous mentez. Vous nous poussez à la barbarie concurrentielle et vous prétendez défendre la culture. Vos Etats sont au service du dressage à la précarité qu’exigent les patrons. Vous défendez l’art, mais, comme disait Kantor, « qu’ils crèvent, les artistes ! ».
Vous le savez, la France qui vous invite aujourd’hui est très fière de son patrimoine culturel et artistique, il paraît même que sa culture lui rapporte 57 milliards d’euros par an, plus que son industrie automobile. Comment comprendre alors que sa Ministre de la Culture ait pu se féliciter d’un nouvel accord sur l’assurance chômage qui va précariser encore davantage les artistes et techniciens du spectacle et du cinéma ?
Que prévoit cet accord ? Une baisse générale de revenu - et un sournois et déjà fameux « différé » de paiement qui vise à précipiter les plus précaires dans l’aide sociale, hors du système mutualiste de l’assurance chômage, qui vise aussi à faire subir à tous les intermittents un stage annuel d’apprentissage à la non-indemnisation, un, deux, trois mois de chômage sans toucher d’indemnités, histoire qu’on approfondisse notre expérience du travail au noir, de la combine, de la jungle néo-libérale. « Opération survie ! », « Sans un sou à Paris ! », « Attention ! C’est votre revenu qui glisse, pas vos factures ! », « Vous n’avez rien, mais payez quand même votre loyer ou vous serez expulsé ! »,« Seuls les plus forts survivront ! ».
Cette farce sinistre concoctée par le MEDEF, nous refusons de la jouer. Nous exigeons que le gouvernement refuse d’agréer cet accord, qu’il oblige enfin ces partenaires asociaux que sont le MEDEF et la CFDT à examiner notre contre-modèle, plus juste et plus économe. Nous saurons rappeler à M. François Rebsamen, notre nouveau Ministre du Travail, qu’il a lui- même co-signé le 9 mars dernier une tribune du Comité de Suivi parlementaire sur l’intermittence. Comment pourrait-il agréer un accord qui ne reprend aucune des préconisations de ce Comité ?...
On nous a pris pour des imbéciles, on nous a dit que les annexes 8 et 10 étaient sauvées, alors que l’accord du 22 mars est une attaque en règle contre tous les précaires et tous les chômeurs, intermittents, intérimaires, avec ou sans papiers. Les gens sont ainsi faits qu’ils n’aiment pas être pris pour des imbéciles. Nous sommes à la veille des grands festivals et nous sommes furieux. Au fait, Mme la Ministre, c’est quand Cannes ?
Le 4 avril 2014
Coordination des Intermittents et Précaires – Île-de-France
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