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Qu’on casse ou pas, la loi travail on n’en veut pas

Publié, le mardi 31 mai 2016 | Imprimer Imprimer |
Dernière modification : mardi 31 mai 2016


Deux mois maintenant qu’on est dans la rue. Ce sont des millions de personnes à travers le pays qui disent de différentes manières leur refus de la réforme du code du travail en cours. Le gouvernement prétend toujours laisser les patrons décider « librement » avec leurs salariés du sort qu’ils leur réservent via des accords d’entreprise, jetant à la poubelle les conventions collectives. Derrière cette question, deux mondes s’affrontent : nous défendons la solidarité et l’auto-défense des plus faibles, quand ils imposent la compétition et la loi du plus fort.

Certains d’entre nous découvrent la grève, d’autres la difficulté de la faire. L’indispensable caisse de grève n’annule pas la pression des collègues et la peur de perdre un emploi déjà précaire. Alors quand certains peuvent assumer une grève à l’ancienne, d’autres s’arrangent comme ils peuvent pour se rendre disponible les jours de manifestations : mot d’absence, travail reporté à plus tard, combine avec des complices au travail.

Dans la rue, nous avons applaudi devant les premières publicités taguées et brisées, quand on ne les barbouillait pas nous-même. Ne nous agressent-elles pas tous les jours, ces images de bouffe toujours plus industrielle ? Ces photos de femmes toujours plus nues, toujours plus maigres ? Les banques ont suivi dans les bris de verre, et nos applaudissement ont redoublé. Est-il vraiment nécessaire d’expliquer longuement ce qui ne va pas avec ces boutiques qui nous vendent l’argent à prix d’or ? Combien sommes-nous à ne rien casser, non par désaccord, mais par peur ou manque de préparation ? Ce n’est pas l’envie qui manque.

Puis vint le tour de la police, avec ces bouteilles jetées sur les lignes bleues postées tout autour de nous. S’attaquer directement à des individus, même en uniforme, pose question. Mais enfin la police, on la connaît. On a mangé des coups, déjà. On a soutenu les familles de ceux que la police assassine, à qui justice n’est jamais rendue. On a été aspergés de gaz lacrymogènes, on a vu le viseur du flashball bien en face.
La police finit par attaquer même les plus sages des cortèges. Nos corps blessés s’en souviennent.

Alors entre ceux qui donnent les coups tous les jours et ceux qui les rendent une fois de temps en temps, le choix est vite fait. « Nous sommes tou.te.s des casseurs », comme disait une banderole. Il arrive que la police abandonne un peu la rue lorsque des gens déterminés lui font face. Et quand il s’agit de faire face aux forces de l’ordre, la frontière entre l’attaque délibérée et la défense improvisée est si mince qu’il ne nous est pas venu à l’idée d’aller pinailler sur les choix des uns ou des autres. Trop contents qu’enfin la rue soit un peu libérée de l’ordre « capitaliste », puisqu’il faut bien appeler les choses par leur nom.

Qu’une voiture brûle ne nous fera pas changer d’avis. L’accusation de « tentative d’homicide volontaire » pourrait nous faire rire tellement elle est grotesque après une attaque certes violente, mais où nul ne peut sérieusement déceler une quelconque envie de tuer. La blague serait drôle si elle ne risquait pas d’envoyer des gens en prison pour longtemps, simplement parce qu’ils ont eu le tort d’être sur les listes hasardeuses des services de renseignement. La préfecture elle-même reconnaît qu’elle a arrêtés ceux qu’elle avait sous la main, sans aucun élément à charge. C’est pour leur présence depuis des mois en tête de manif à nos cotés que certains payent aujourd’hui le prix fort ! [1]. On les soutient, comme on soutient toutes celles et ceux qui ne peuvent plus être là à cause de contrôles judiciaires, d’interdiction de déplacements ou de blessures.

Alors oui, la tension monte. Mais peut-on imaginer gagner sans qu’il y ait de tensions ? Quoi qu’on fasse, le gouvernement réprimera celles et ceux qui s’opposent à lui. Personne ne s’intéresse aux élections de l’année prochaine. Personne ne croit à la possibilité d’élire une personne courageuse qui irait seule affronter les banquiers pour changer les règles du jeu. C’est dans la rue que ça se passe. Ça tombe bien, nous y sommes. Foulards et lunettes de protection en poche, pour pouvoir y rester.

Quelques dizaines de personnes de banlieue parisienne / Précaires, chômeuses, fonctionnaires, doctorantes... qui bossent au black, en CDI ou sans salaires / Et participant toutes aux cortèges de tête offensifs et solidaires contre la loi Travail



Tract trouvé dans la manifestation contre la loi Travail du jeudi 26 mai. Lire aussi Qu’on bosse on pas, la loi travail on n’en veut pas, un tract signé de la même manière et diffusé lors de la manifestation parisienne du 31 mars.



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