mardi 15 juillet 2003
Dernière modification : dimanche 20 juillet 2003
La vérité est toute autre. Rappelons les faits.
Un protocole d’accord sur le régime d’assurance chômage a été conclu le 20
décembre dernier entre le patronat et trois centrales syndicales. Dans ce
protocole, il était indiqué que " les partenaires sociaux engageront une
négociation relative aux annexes 8 et 10 au cours du premier semestre 2003
".
Il était donc question pour les signataires d’engager une négociation avant
le 30 juin 2003 sachant qu’actuellement les Annexes Cinéma Spectacle sont
protégées juridiquement par la Loi du 21 février 2002 adoptée à l’unanimité
par l’Assemblée Nationale. Ce texte de loi précise en substance que les
Annexes 8 et 10 issues de la Convention Unedic du 1er janvier 97
continueront à produire tous leurs effets dans l’attente d’un accord des
partenaires sociaux assortis d’un agrément ministériel. Il n’y avait donc
aucune obligation à conclure dans la précipitation avant le 1er juillet
contrairement aux affirmations des signataires du protocole du 26 juin
dernier et de l’avenant du 8 juillet.
Dès le 27 janvier 2003 et à l’issue d’une assemblée générale des
professionnels au Théâtre National de Chaillot, nous avons demandé au
Ministre de la Culture préalablement aux discussions interprofessionnelles,
une concertation nationale au niveau professionnel. Cette demande a été
réitérée durant plusieurs mois. Le Ministre de la Culture s’y est refusé
obstinément en se retranchant derrière les prérogatives des partenaires
sociaux qui gèrent l’Unedic.
Les négociations sur les Annexes Cinéma Spectacle ont fait l’objet de cinq
réunions paritaires les 3, 6, 11 et 26 juin (date de la signature du
protocole d’accord engageant le MEDEF et trois centrales syndicales
minoritaires) et le 8 juillet après que le Ministre ait demandé aux
partenaires sociaux de revoir un certain nombres de dispositions.
Le 8 juillet, un avenant a été signé par les mêmes organisations dont
l’économie générale n’est en rien fondamentalement modifiée puisque, pour
l’essentiel, celui-ci prévoit de reporter sur 2004 et 2005 les restrictions
des conditions d’entrée dans les Annexes 8 et 10 et l’amputation des durées
d’indemnisation.
Il convient de souligner que, dès le 28 juin, notre Fédération a fait
parvenir au Ministère de la Culture un mémorandum relatif au protocole
d’accord du 26 juin dans lequel nous procédions à une analyse, article par
article, de ce texte.
A ce jour, personne n’a contesté la pertinence de nos observations.
D’autre part, nous avions, dès le 25 février, interpellé le Premier Ministre
sur ce dossier. Nous lui demandions de s’engager sans attendre pour " la
sauvegarde de notre régime d’assurance chômage, garante de l’exception
culturelle « tout en précisant que » des réformes sont nécessaires, nous les
réclamons depuis des années, et nous avons fait des propositions qui ont
d’ailleurs fait l’objet d’un accord professionnel, comme l’avait demandé
E.A. Seillières à nos employeurs. Mais le MEDEF ignore ces propositions et
en impose d’autres, qui bafouent les spécificités de nos métiers.. ".
Le 14 mars 2003, Jean-Pierre Raffarin nous indiquait son attachement " à
l’existence de dispositions particulières au sein de l’assurance chômage qui
tiennent compte de la spécificité de vos métiers et de la solidarité
interprofessionnelle « . Le Premier Ministre ajoutait » La modification des
règles du régime d’indemnisation du chômage relève de la responsabilité des
Partenaires Sociaux. Mon gouvernement est respectueux du dialogue social et
souhaite par conséquent que les solutions soient élaborées dans ce cadre.
Toutefois, considérant l’importance pour notre vie culturelle de cette
question, mon gouvernement suivra avec attention les négociations qui
s’engageront entre les Partenaires Sociaux. ".
Contrairement aux affirmations du Ministre de la Culture, nous n’avons pas
tu les quelques avancées (qui, pour certaines, ne sont pas sans ambiguïté)
notamment sur les formations dispensées - dont les techniciens sont
d’ailleurs curieusement exclus, - le maintien des prérogatives du fonds
d’assurance formation du spectacle - l’AFDAS - ou encore le léger relèvement
du plafond mensuel des cachets effectués par les artistes interprètes(fixé à
28 cachets par mois dans l’avenant du 8 juillet, ce qui est contraire aux
accords collectifs de travail).
Qui peut nous démentir lorsque nous déclarons que le protocole d’accord du
26 juin était « pipé » à l’avance ?
Qui peut affirmer que la réduction de la période de référence pour la
recherche des droits et l’amputation des durées d’indemnisation ne se
traduiraient pas par l’exclusion de milliers de professionnels. Ceux-là
mêmes, qui pour la plupart, se trouvent être parmi les plus précaires
puisqu’ils perçoivent actuellement une indemnité journalière de 15 ? par
jour ?
Qui peut nous contredire lorsque nous affirmons que certaines entreprises,
quelles soient publiques ou privées (et non des moindres), pourront
continuer avec cet accord à recourir abusivement à l’intermittence de
l’emploi ?
Ne faut-il pas être sourd pour ne pas entendre le rejet quasi-unanime de nos
professions à la mise en ouvre de cet accord comme le montre l’ampleur des
mouvements de grèves, des manifestations ou bien des différentes pétitions
rendues publiques au cours de ces dernières semaines ?
Alors, nous posons la question : pourquoi tant de précipitation et pourquoi
vouloir passer à tout prix en force ?
Nous sommes légitimement en droit d’exprimer notre colère et y compris par
la grève. Alors qui est l’otage de qui ?
Ne serait-ce pas le Ministre de la Culture qui aurait été pris en otage par
le MEDEF ?
D’ailleurs, il suffit pour cela, de se reporter aux propos de E.A.
Seillières qui, il y a quelques jours, admonestait le gouvernement. Qui
pourrait admettre que la politique sociale et culturelle de notre pays soit
dictée par le MEDEF ?
Oui, Monsieur le Ministre, vous avez pris la responsabilité de la crise que
nous connaissons et donc de l’annulation de plusieurs festivals.
Pourtant, nous estimons qu’il est encore temps de calmer le jeu. Il faut
renoncer à l’agrément de cet accord minoritaire. Et il faut appeler les
partenaires sociaux à le renégocier dès la rentrée.
Nous en appelons au Président de la République.
Paris, le 11 juillet 2003